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© Mutations : Propos Recueillis Par Jean Daniel Obama     lundi 8 août 2016 01:15     1415

L’ex-sélectionneur, champion olympique 2000, revient sur l’absence du Cameroun depuis 2008 sur le podium de cette compétition.

Vous êtes le seul entraineur camerounais à avoir jusqu’à présent remporté une médaille d’or avec une sélection nationale de football. Comment arrivez-vous à la tête de cette sélection ?
J’arrive à la tête de cette sélection par le choix du ministre de la Jeunesse et des sports, monsieur Joseph Owona, parce qu’il avait sûrement trouvé en moi celui qui pouvait faire l’affaire. Il faut quand même préciser qu’il me nomme à quatre ou cinq mois des Jeux africains de Johannesburg 1999. Mes adjoints que sont monsieur Ntoungou et monsieur Mbarga, nous prenons donc l’équipe en main et nous la qualifions pour ces Jeux africains de 1999 que nous gagnons pour la deuxième fois, après ceux gagnés au Caire par sadi Jean Pierre quatre ans avant. Après cela, nous sommes rentrés dans les préliminaires des Jeux olympiques deux semaines après et nous nous qualifions pour aller  à Sydney en Australie.

Vu votre performance à cette compétition, on peut donc dire que l’Etat du Cameroun a mis des moyens suffisants à votre disposition ? 
La chance que nous avons eu justement à cette période c’est que la plupart de nos joueurs étaient arrivés à maturité et ils remplissaient surtout les critères d’âge. Ils jouaient dans de grands clubs en Europe et on ne tolérait que trois joueurs qui avaient plus de 23 ans. Ils avaient pour la plupart entre 18 et 22 ans et voulaient tous frapper un grand coup. En tant que sélectionneur, j’avais retenu 18 joueurs dont j’étais sûr de pouvoir briser le signe indien qui voulait que les pays africains soient toujours des figurants à cette compétition. Néanmoins, le Nigéria qui est notre voisin était déjà détenteur de cette médaille d’or. Alors je me suis dit que si le Nigéria l’a fait, pourquoi pas le Cameroun, puisque dans leurs confrontations, le Cameroun a toujours pris le dessus sur le Nigéria ? Il faut souligner que nous avions eu tous les moyens possibles pour aller à cette compétition, grâce au ministre Bidoung Mpkpatt, qui vient remplacer Joseph Owona. Il nous a permis de faire des stages dans de grands pays comme l’Allemagne, l’Angleterre et la France, ce qui fait que ça n’a pas été facile de sélectionner les 18 noms. 

Le Cameroun est mené par l’Espagne par 0-2. Vous allez aux vestiaires et à votre retour, les Lions remontent le score et finissent par remporter le match. Que s’est-il passé ? 
Nous rencontrons d’abord le Brésil en quart de finale, le Chili en demi-finale et l’Espagne en finale. Nous avons été cueillis à froid par l’Espagne en finale 2 buts à 0. Mais j’avais dit à mes joueurs que, tant qu’un match n’est pas arrivé à son terme, il n’est pas joué. C’est aussi ça le sport. À la mi-temps, j’ai tenu un discours très facile à mes joueurs. Je leur ai dit : l’Espagne nous a marqué deux buts en à peine dix minutes de jeu, nous pouvons revenir au score. J’ai procédé à quelques réajustements et j’ai fait des remplacements. J’ai parlé juste pendant cinq minutes à mes joueurs et j’ai demandé à mon staff de les laisser jouer. D’autant plus que cette équipe d’Espagne n’était pas fameuse. Non seulement nous avons commencé à équilibrer le jeu, mais aussi avoir l’ascendant sur cet adversaire. Et je me suis dit que si nous continuons sur cette lancée, il n’y a aucune raison de ne pas les battre. Et c’est ce qui a été fait. Nous avons égalisé grâce à un but de Patrick Mboma et un autre de samuel Eto’o . Nous sommes allés aux tirs au but et vous connaissez la suite.  

Voici déjà seize ans que le Cameroun n’a plus rien gagné en football pour ce qui est des Jeux olympiques. Comment expliquez-vous cette  absence des Lions indomptables ?
C’est donc ça les réalités du sport. Quand on ne sait pas préparer la relève, c’est ce qui arrive. Le Cameroun souffre d’un problème d’organisation à la base et de l’absence d’une véritable politique sportive. Je vous ai dit que la plupart de l’effectif dont je disposais avait pour la plupart atteint l’âge limite, donc ne pouvait plus faire une autre olympiade. C’est vrai que je disposais des joueurs dotés d’un certain talent, main il faut dire que le Cameroun devait former d’autres juniors pour assurer la relève. Pour ce qui est des primes, vraiment, je ne peux pas vous dire comment ça se passe au Cameroun ! Il faut peut-être poser la question au Comité national olympique. À notre départ du Cameroun, rien ne nous avait encore été donné comme primes. Eto’o  avait posé la question sur la table et le ministre avait répondu que la prime de participation est de 250.000 FCFA par personne et 200.000 FCFA par match gagné. Et Eto’o  lui avait répondu que cette somme-là ne couvrait même pas ses frais de téléphone pour une seule journée et il leur a demandé de garder leur argent. Et là, nous sommes déjà à Sydney. Les joueurs ont néanmoins décidé de jouer et de revendiquer leurs primes une fois la compétition terminée. Une fois que les gars se sont qualifiés pour la finale, j’ai passé une nuit blanche avec le ministre des sports, puisqu’il fallait payer les primes aux joueurs. J’ai suggéré au ministre d’appeler son patron qui est le Premier ministre pour essayer de trouver une solution à ce problème. Heureusement qu’entretemps, le président de la République avait déjà envoyé quelqu’un pour venir rencontrer la délégation avec de l’argent en guise d’encouragement. Voilà comment nous sommes rentrés sur le terrain le lendemain et c’est ce qui explique en grande partie la performance des Lions indomptables en début de match contre l’Espagne.